Mini-colloque 2012 : Hommage à Henri Poincaré
organisé par Jean-Marc GINOUX (Univ. du Var, Toulon), Christophe LETELLIER (Univ. de Rouen) et Jean MAWHIN (Univ. Catholique de Louvain).
14 mars 2012, Institut Henri Poincaré, amphithéâtre Hermite
Cette journée sera l'occasion de retracer différents aspects de la vie et de l'oeuvre d'Henri Poincaré, le père de la dynamique non linéaire et du chaos, à l'occasion du centième anniversaire de sa mort. Cette page reflète les informations disponibles ici.
Le programme de la Rencontre du Non-Linéaire proprement dite, qui aura lieu du 15 au 16 mars, est disponible ici.
Orateurs invités
- June BARROW-GREEN (The Open University)
- Christian GÉRINI (Université Var-Toulon)
- Jean Marc GINOUX (Laboratoire Prothée, Université Var-Toulon)
- Jean MAWHIN (Louvain)
- Valérie MESSAGER et Christophe LETELLIER (Rouen)
- Christian MIRA
- Laurent ROLLET (Archives Poincaré, Nancy)
- Anne-Françoise SCHMID (INSA Lyon)
Le programme
Les résumés
Henri Poincaré and the three-body
problem
June
BARROW-GREEN (The Open University)
Mathematics and Statistics Department,
The Faculty of Mathematics, Computing and Technology,
The Open University, Walton Hall, Milton Keynes,
Buckinghamshire, MK7 6AA, UK.
From early in his career Poincaré had been interested in the
fundamental problems of celestial mechanics (such as the stability
of the solar system), and many of the papers he published in the
1880s relate to his interest in the subject and to the three-body
problem in particular. The problem figures prominently in his
acclaimed four-part memoir on curves defined by differential
equations (1881-1886), and Poincaré was quite clear about its
motivating role. These papers are full of new ideas, many of which
form the basis for results in his most famous work on the three-body
problem, the memoir of 1890. In this memoir Poincaré developed a
theory of periodic solutions that opened up an entirely new way of
thinking about dynamical problems. It is renowned for containing the
first description of what today we would describe as mathematical
chaos and for providing the basis for his acclaimed Les méthodes
nouvelles de la mécanique céleste (1892-1899). Poincaré also
produced many papers relating to the problem-seeing to the needs of
astronomers as well as to those of mathematicians-up to and
including his final publication Sur un théorème de géométrie (1912).
In this talk I shall discuss Poincaré's work on the problem and look
forward towards some of the work his research inspired.
- J. Barrow-Green, Poincaré and the three body problem, American Mathematical Society, 1996.
Poincaré et l'équation des
télégraphistes
Jean
MAWHIN
Université Catholique de Louvain,
Département de Mathématiques
Le développement des liaisons télégraphiques intercontinentales au milieu du XIXe siècle a conduit les mathématiciens à modéliser la propagation d'un signal électrique dans un fil conducteur. Les étapes principales seront décrites. Après avoir donné la première solution complète de l'équation des télégraphistes, Poincaré en a fait le sujet d'une série de conférences à l'École Supérieure de Télégraphie. On analysera ses contributions.
- H. Poincaré, Sur la propagation de l'électricité, Comptes-Rendus de l'Académie des Sciences, 117, 1027-1032, 1893.
- H. Poincaré, Etude de la propagation du courant en période variable sur une ligne munie d'un récepteur, L'Eclairage électrique, 40 , 121-128 ; 161-167 ; 201-212 ; 241-250 1904.
Les conférences oubliées d'Henri Poincaré à
l'Ecole Supérieure des Postes et Télégraphes (Sup'
Telecom)
Jean-Marc GINOUX
E.A. Protée, Université du Sud Toulon-Var
Le 4 juillet 1902, Henri Poincaré est nommé professeur d'Electricité Théorique à l'Ecole Supérieure des Postes et Télégraphes qui se trouve alors rue de Grenelle. En 1901, le nouveau directeur Edouard Estaunié propose de compléter les cours par des conférences. Henri Poincaré inaugure le cycle et effectue ainsi en mai-juin 1904, 1906, 1908, 1910 et 1912 différents exposés sur les sujets de son choix. En ce début de XXème siècle, la Télégraphie Sans Fil (T.S.F.) en est à ses balbutiements et l'un des moyens employé pour transmettre un signal est le dispositif inventé par William Du Bois Duddell et qu'il a nommé "arc chantant". Basé sur le principe de l'excitateur (ou éclateur) de Hertz il présente l'avantage considérable d'entretenir les oscillations produites au lieu de les amortir ouvrant ainsi de belles perspectives aux procédés de télécommunication. Les ingénieurs et expérimentateurs sont à cette époque confrontés à deux problèmes : amorcer les oscillations et les entretenir. Alors que le premier a été pratiquement résolu du point de vue théorique comme du point de vue pratique, le second semble résister à l'analyse mathématique. C'est précisément ce sujet qu'a choisi Poincaré pour sa conférence de 1908 dans laquelle il va mettre en application le concept de "cycle limite" (introduit vingt ans auparavant dans un contexte purement mathématique) pour établir l'existence d'un régime stable d'ondes entretenues. Il va ainsi démontrer que lorsque solution de l'équation différentielle caractérisant les oscillations entretenues par un "arc chantant" a la forme d'un "cycle limite", c'est-à-dire, d'une courbe fermée vers laquelle converge asymptotiquement toutes les autres courbes, le système présente un régime stable d'oscillations entretenues. La découverte de ces conférences "oubliées" de Poincaré bouleverse quelque peu l'historiographie qui considérait jusqu'alors que c'était le mathématicien russe Aleksandr' Andronov qui avait le premier obtenu ce résultat, c'est-à-dire, qui avait réalisé cette correspondance entre science et technique en 1929. Cet exposé a pour but de présenter d'une manière pédagogique et accessible au plus grand nombre le contenu de cette conférence "oubliée" de 1908 ainsi qu'une partie des travaux de Poincaré en T.S.F.
- H. Poincaré, Sur la télégraphie sans fil, La lumière Électrique, 4, 259-266, 291-297, 323-327, 355-359, 387-393, 1908.
- J.M. Ginoux & L. Petitgirard, Poincaré's forgotten conferences on wireless telegraphy, International Journal of Bifurcation & Chaos, 11 (20), 3617-3626, 2010.
Poincaré : ses héritiers
1908-1975
Christian MIRA
Les résultats de Poincaré, relatifs aux méthodes analytiques, et aux méthodes qualitatives de la dynamique non linéaire, ont fourni les outils fondamentaux de recherches interdisciplinaires, qui ont connu ensuite un développement spectaculaire. Parmi les chercheurs qui ont fait un usage intensif de tels outils, ce texte parle en particulier de la contribution de Birkhoff (USA), en URSS des écoles dites d'Andronov (Gorki) et de Kiev, au Japon de celle d'Hayashi.
- C. Mira, Some historical aspects of nonlinear dynamics-Possible trends for the future, Journal of the Franklin Institute, 334 (5-6), 1075-1113, 1997.
Henri Poincaré et le principe de
relativité
Valérie MESSAGER et Christophe
LETELLIER
CORIA, Université de Rouen
Pour Henri Poincaré, toute théorie s'ancre dans un contexte historique de faits scientifiques [...]. L'émergence de la généralisation du principe de relativité par l'introduction de la transformation de Lorentz, n'échappe pas à cette conception et résulte d'une série de travaux sur la propagation de la lumière remontant aux contributions d'Augustin Fresnel [1] ou d'Hippolyte Fizeau [2]. Notre objectif est de montrer comment la contribution de Poincaré s'inscrit dans la continuité des travaux de James Clerk Maxwell [3], d'Albert Michelson et Edward Morley [4], George Fitz Gerald [5], Hendrick Lorentz [6], et qu'elle s'étend sur une période d'une dizaine d'années entre les premiers textes de 1895 [7] et de 1898 [8] et les contributions de 1905 [9]. Il sera également montré que les résultats majeurs comme la constance de la vitesse de la lumière [10], la dépendance de la masse apparente avec la vitesse [11] ou l'effet Doppler [12] avaient été discutés bien avant 1905. Finalement, nous montrerons que l'invariance des équations de Maxwell sur un certain changement de repère - ce qui conduit à la relativité restreinte - se présente comme une théorie qui a progressivement émergé sur près d'un quart de siècle. La contribution de Poincaré se présente comme une synthèse avec un souci constant de la recherche des conséquences les plus générales, comme il le fit dans la plupart de ses recherches.
- [1] A. Fresnel, Sur l'influence du mouvement terrestre dans quelques phénomènes optiques, Annales de Chimie et de Physique, 9, 57-66, 1818.
- [2] H. Fizeau, Sur les hypothèses relatives à l'éther lumineux, et sur une expérience qui paraît démontrer que le mouvement des corps change la vitesse à laquelle la lumière se propage dans leur intérieur, Comptes Rendus de l'Académie des Sciences, 33, 349-355, 1851.
- [3] J. C. Maxwell, Encyclopedia Mathematica, 1878.
- [4] A. Michelson & E. Morley, On the relative motion of the Earth and the luminiferous ether, American Journal of Science, III, 34, 333-345, 1887.
- [5] G. FitzGerald, The aether and the Earth's atmosphere, Science, 13, 390, 1889.
- [6] H. A. Lorentz, De relative beweging van de aarde en den aether, Verslagen en Mededeelingen der Koninklijke Akademie van Wetenschappen Amsterdam, 1, 74, 1892.
- [7] H. Poincaré, A propos de la théorie de M.Larmor, L'Eclairage électrique, 5, 5, 1895
- [8] H. Poincaré, La mesure du temps, Revue de métaphysique et de morale, 6, 1-13, 1898.
- [9] H. Poincaré, Sur la dynamique de l'électron, Comptes Rendus de l'Académie des Sciences, 140, 1504-1508, 1905 - H. Poincaré, Sur la dynamique de l'électron, Rendiconti del Circolo Matematico di Palermo, 21, 129-175, 1906.
- [10] G. J. Stoney, Sur les unités physiques de la Nature, Meeting of the Liitish Association (Belfast), Août 1874 - G. J. Stoney, On the physical units of Nature, Philosophical Magazine, 11, 381, 1881
- [11] W. Kaufmann, Über die elektromagnetische Masse des Elektrons, Göttingen Nachrichten, p. 291, 1902 - E. Rutherford, The existence of bodies smaller than atoms, Royal Society of Canada, 8, 79-86, 1902.
- [12] W. Voigt, Über das Döppler'sche Princip, Nachrichten von der Königlichen Gesellschaft der Wissenschaften zu Gottingen, 44-51, 1887.
La réception de l'oeuvre philosophique de
Poincaré dans la presse de son époque
Christian GÉRINI
Université Var-Toulon
Les quatre ouvrages à caractère philosophique d'Henri Poincaré (trois publiés de son vivant, un post mortem) ont eu un succès public très important pour son époque. L'aura du personnage y contribua, mais l'écho qu'en fit la presse joua aussi un rôle certain, même si c'était sur des récupérations idéologiques de son oeuvre dont il eut à se défendre. Nous montrerons donc comment La science et l'hypothèse, La valeur de la science, Science et méthode, et enfin Dernières pensées, furent reçus dans la presse grand public, et comment la pensée de Poincaré fut parfois détournée ou affublée de qualificatifs qui ne lui correspondaient pas ou que partiellement.
La valeur de la philosophie des sciences selon
Poincaré et ses suites contemporaines
Anne-Françoise
SCHMID
INSA de Lyon, EVS-Itus (UMR 5600)
associée aux Archives Poincaré (Umr 7117),
membre de la Chaire Théorie et Méthodes de la Conception Innovante
(Mines, ParisTech), Centre de Gestion Scientifique
Poincaré indique dans sa philosophie des perspectives permettant de mettre en relation des fragments disciplinaires avec d'autres fragments de disciplines différentes. En cela, il est un peu le Leibniz des sciences contemporaines, à propos duquel il avait écrit une fameuse Note. Cela a été peu remarqué, parce que l'on a généralement étudié la philosophie de Poincaré discipline par discipline (arithmétique, géométrie, mécanique, physique théorique, physique expérimentale). Si l'on considère son fonctionnement d'ensemble, sa philosophie des sciences ne se réduit simplement à aucune interprétation qu'on a pu donner de lui, déjà de son vivant. Elle n'est ni un empirisme, ni un inductivisme, ni un idéalisme, ni un pragmatisme, ni un nominalisme scientifique, ni un conventionnalisme. Aucune de ces interprétations ne donne à elle seule tout Poincaré. Je propose d'appliquer à sa philosophie une idée qui lui était chère. Elle pourrait être qualifiée comme ce qui est laissé invariant si l'on considère toutes ces interprétations comme les éléments d'un groupe de transformation. Nous montrerons qu'elle a quelque vertu pour apporter de nouvelles perspectives dans l'épistémologie des sciences contemporaines.
- Anne-Françoise Schmid, Henri Poincaré, les sciences et la philosophie, Paris, L'Harmattan, 2001
Du procès de Rennes à l'enquête de la Cour de
Cassation : Henri Poincaré dans l'affaire Dreyfus
(1899-1904)
Laurent ROLLET
Université de Lorraine
Laboratoire d'histoire des sciences et de philosophie
Archives Henri Poincaré (UMR CNRS 7117)
Henri Poincaré est certainement plus connu pour ses travaux scientifiques et philosophiques que pour son engagement social et politique. Il demeura toujours très discret quant à ses opinions politiques (qui le portaient vers un républicanisme modéré) et sa vie ne fut guère marquée par de grands combats idéologiques. Il fut pourtant fut un acteur essentiel de l'affaire Dreyfus, notamment en raison de l'expertise scientifique qu'il mena conjointement avec Paul Appell et Gaston Darboux sur le bordereau accusant Alfred Dreyfus : « Examen critique des divers systèmes ou études graphologiques auxquels a donné lieu le bordereau » (1904). Cette conférence vise à donner un aperçu de cet engagement singulier dans un des événements socio-politiques majeurs de la Troisième République. On montrera en particulier qu'à la différence d'un Paul Painlevé pour qui l'Affaire constitua un tournant décisif, le moment de son entrée en politique Poincaré se cantonna toujours dans un rôle d'expert et d'homme de science, soucieux du respect des canons de la rationalité contre la dérive technique des savoirs scientifiques et se gardant bien d'entrer dans l'engrenage des luttes entre dreyfusisme et antidreyfusisme.
- L. Rollet, Autour de l'Affaire Dreyfus : Henri Poincaré et l'action politique, Revue historique, CCXCVIII, 3, 49-101, 1999.
- L. Rollet, Des mathématiciens dans l'Affaire Dreyfus ? Autoforgerie, bertillonage et calcul des probabilités, Images de mathématiques, 2010.
Et puis également
- L. Rollet, Henri Poincaré : Des mathématiques à la philosophie. Étude du parcours intellectuel social et politique d'un mathématicien au tournant du siècle, Éditions du Septentrion (Lille), 2000.
- Henri Poincaré : L'opportunisme scientifique / Scientific Opportunism, An Anthology Compiled by Louis Rougier, edited by Laurent Rollet, Birkhäuser (Berlin), 2002.
- H. Poincaré, Science et méthode, Nouvelle édition de l'ouvrage de Poincaré, accompagnée d'une préface et d'un appareil critique - Edité par Laurent Rollet. N° spécial de la revue Philosophia Scientiae. Paris, Kimé, 2011.
- A. Boutroux, Vingt ans de ma vie, simple vérité... La jeunesse d'Henri Poincaré racontée par sa soeur (1854-1878) - Texte inédit édité par Laurent Rollet. Paris, Hermann, 2012.
Le mini-colloque, comme la Rencontre du Non-Linéaire 2012, bénéficie du soutien de
- du Laboratoire de Physique des Lasers, Atomes, Molécules (PhLAM),
- de l'Institut Jean le Rond d'Alembert,
- du Complexe de Recherche Interprofessionnel en Aérothermochimie (CORIA),
- du laboratoire Matière et Systèmes Complexes,
- du GDR 2984 DYCOEC (Dynamique et Contrôle des Ensembles Complexes)
- de l'Institut Henri Poincaré et
- du Centre National de la Recherche Scientifique.
IMAGES
Contrôler les oscillations d’une goutte (plus de détails...)
CONFÉRENCES
New Challenges in Turbulence Research VII, École de Physique des Houches, 10 Février 2025
New Challenges in Turbulence Research VII, École de Physique des Houches, 10 Février 2025
New Challenges in Turbulence Research VII, École de Physique des Houches, 10 Février 2025